mercredi 18 avril 2012

Réflexion du jour.

Presse française, bonjour.

Dans l'article suivant, la rubrique Sport de Rue89 nous explique qu'un médecin a découvert chez de jeunes hommes rugbymen amateurs une forme de cancer atypique, qu'il a relié à celle diagnostiquée chez deux autres hommes également rugbymen amateurs, sauf que ces derniers sont décédés des suites de leur maladie.
S'en suit un article sur le dopage chez les jeunes, qui prennent des produits illégaux en les commandant sur internet pour supporter la dureté des entraînements. D'où des cancers et autres effets secondaires sympas qui pointent le bout de leur nez chez des sportifs qui ont à peine passé la vingtaine. Sérieusement, on croit rêver (et c'est un cauchemar, bien sûr).
Je trouve quand même qu'il y a un cancer dont on ne parle pas beaucoup et qui touche pourtant la plus grosse majorité de la population, et ce depuis des millénaires: la connerie. Si on trouvait un moyen de l'éradiquer, celui-là, on n'en serait pas à se lamenter devant ce genre de récits accablants.
Accablants pour les dopés, mais évidemment pour leurs entraîneurs et pseudo-médecins (nan mais quand même, les mecs qui ont signé le serment d'Hipocra/i/te apprennent aux jeunes à se faire des piqûres, JE RIS) et le sport en général.
Comment, elle traite ces jeunes de cons, mais enfin ils sont prisonniers du système de compétition, de la pression du groupe... réveillez-moi quand vous aurez fini de les excuser ces pauvres chéris, pardon mais je ne crois pas à ce dédouanement facile sous-tendu par un déterminisme un peu simpliste qui, par ailleurs, confine à l'insulte en ignorant le fait qu'il y a aussi des jeunes qui refusent le dopage. Et je refuse de croire que ceux-là soient des entités supérieurement intelligentes au reste de la population.
On pourra blâmer le rugby, c'est vrai que ces brutes épaisses sont pas entraînées pour penser mais pour avoir les cheveux longs et des grosses cuisses.
Et bien là encore je dis NON! Déjà les stéréotypes, ça pue, et en plus, j'aime bien le rugby. Mais surtout, contre-exemple: une bonne amie de prépa avait été dans une autre vie championne de France junior de 500 mètres haies (le truc qui tue) et m'avait parlé plusieurs fois de ses co-compétitrices qui se dopaient à la Ventholine, entre autres, prétendant qu'elles avaient de l'asthme. Le début d'un dopage qui passe au niveau supérieur quand les compétitions deviennent importantes, etc. On connaît l'engrenage.
Remarque au passage: je ne sais pas quel médecin peut se réclamer de cette profession s'il donne le droit à un asthmatique de faire une des courses les plus longues et épuisantes qui soit en matière d'athlétisme, mais passons sur ce détail.
Donc, le dopage, chez les jeunes, oui, ça existe, et c'est bien malheureux. Les premiers responsables, ce sont eux, bien sûr, ceux qui sont suffisamment inconscients pour se mettre des trucs dans le corps dont ils ne connaissent même pas les composantes et les effets réels. Plus largement, on peut blâmer ceux qui sont censés les encadrer et les soigner, trop aveuglés par les résultats et le fric qui en découle pour ne pas taper sur les doigts de leurs jeunes chiens fous.
Globalement, c'est déplorable parce qu'on constate que le sport est perverti par cette obsession de réussite capitaliste, il faut bien le dire - et pas besoin d'être marxiste pour voir la vérité en face. C'est bien dommage que des jeunes se tuent à plus ou moins petit feu juste pour une histoire de performance, mais ne soyons pas naïfs, ça fait longtemps que cela existe.

Et c'est pourquoi je comprends les gens qui sont complètement anti-sport, qui trouvent que c'est le nouvel opium du peuple, que c'est n'importe quoi et que cette obsession de classer les gens n'est bonne que pour le moral des premiers.
Difficile de contrer ces arguments. On peut en revanche les nuancer. Je trouve que bien des sports se perdent dans leur exigence et créent des traumatismes physiques et psychiques regrettables. Par exemple, je me souviens toujours du moment où on m'a expliqué que ma note évaluant ma performance à une compétition de patin à roulette avait été divisée par deux car, étant gauchère, j'avais réalisé les figures imposées en miroir. Allez expliquer ça à une gamine de 8 ou 10 ans très bonne élève et très inquiète de toujours bien faire, surtout quand il s'agit des notes. Inutile de préciser que j'ai chialé comme la madeleine que j'étais (non pas que j'aie quelque chose contre Proust ou ces gâteaux...). Si j'avais été un peu plus grande, j'aurai été leur mettre une baffe, à ces juges. Voilà le degré de minabilité que la compétition peut atteindre, c'est kafkaïen, et effectivement, quand le sport c'est ça, moi aussi, il cesse de m'intéresser.
Cela dit, depuis que je suis aux Etats-Unis, je suis bien plus sportive que je ne l'étais en France, et je ne peux que me remercier d'avoir eu la folie de m'inscrire au club de boxe de la fac cette année. Avoir un corps qui marche, c'est bien. C'est même une chance, parce que le hasard génétique fait parfois les choses de façon un peu moins cool. Mais avoir un corps qui marche et qui marche bien, c'est encore mieux. Ne pas avoir mal aux genoux en montant des marches, ne pas être essoufflée en portant les sacs de courses, se lever sans appui parce qu'on a des abdos qui sont en état de fonctionner, avoir une capacité respiratoire supérieure à celle d'un rat mucoviscideux... Il y a plein de choses du quotidien qu'on fait mieux et plus facilement avec une pratique sportive régulière. On est moins fatigué. On est plus concentré.

Tout ça pour dire que le sport, c'est un confort de vie supplémentaire qui ne devrait pas faire de mal à celui qui le pratique. Et on devrait se foutre éperdument du niveau pratiqué du moment que c'est celui qui convient aux choix et au physique de la personne concernée. Et à ceux qui disent que le sport remplace des divertissements intelligents comme la lecture, je dirais que c'est vrai et faux. A se considérer comme un pur esprit, on finit par se couper d'une partie importante de soi, et ça ne marche pas comme ça, quoi qu'on en dise. Oui, il y a des gens qui sont maçons et qui aimeraient bien passer leur vie ailleurs qu'en plein soleil à trimballer des briques. Ce n'est pas pour ça qu'il faut interdire à l'employé de bureau de base son petit footing du dimanche. On peut voir ça comme une version cynique et bourgeoise du "retour à la terre", soit. Mais pour avoir passé trois ans en prépa, je sais que si je m'étais entraînée AU MOINS trois fois par semaine, j'aurai encore mieux compris et intégré la tonne de trucs que j'ai dû assimiler au rythme qu'on connaît.
Une autre critique, et pas des moindres, à cet argument est qu'il nie la dimension intellectuelle du sport. Excusez-moi, mais il n'y a qu'en matière de guerre et de sport qu'on pratique autant l'art de la stratégie, et ce n'est pas pour les imbéciles. Pendant un combat de boxe, une course, ou un match de foot, il faut savoir mesurer son adversaire, prendre en compte tout un tas de facteurs sur lesquels on n'a aucune emprise, et savoir évaluer sa propre forme physique pour l'exploiter au mieux dans les moments clés. Autant d'éléments qui différencient les champions des autres. A la boxe, quand on voit que physiquement, on est plus faible, on peut quand même gagner si l'on est suffisamment rusé pour fatiguer l'autre. Et ce n'est pas une mince affaire...
Enfin, je pense que l'on peut dire en toute honnêteté que toute pratique sportive digne de ce nom, c'est-à-dire effectuée avec REGULARITE, nécessite un effort intellectuel qui peut se révéler important dans la (trans)formation d'un caractère ou d'une personnalité. Même le joggeur du dimanche se soumet à une discipline qui demande une certaine volonté, surtout les jours de pluie, les jours où on est un peu fatigué, les lendemains de nuits blanches... Et il y a beaucoup de jours comme ça.
Un jour, Jim, le coach principal de l'équipe, nous a dit: "Il n'y a qu'un jour dans la vie du boxeur où il pourra s'entraîner au mieux de sa forme, sans douleur ni blessures ni courbature... c'est le premier."

A ce sujet, une excellente pub de (maheureusement) Nike, pour ceux qui parlent anglais:



S'engager dans une pratique sportive n'est donc pas faire le choix de conserver au fil de sa vie un niveau intellectuel moyen voire bas. Le stéréotype du sportif con a la peau dure, j'en conviens, et j'en témoigne, au vu des "sport-études" judokas de mon lycée qui, depuis ô surprise, a supprimé cette section (il ne fait pas bon de voir que la supposée élite du lycée ayant accueilli David Douillet en tant qu'élève balancent des "salope!" à tour de bras, j'en passe et des meilleures...), mais je peux vous le dire, ce n'est pas le sport qui fait ça, c'est la personne qui le pratique sans en comprendre les principes. J'en veux pour preuve qu'au club, les meilleurs boxeurs sont les personnes les plus ouvertes, respectueuses... bref, celles qui ne sont pas là pour apprendre comment taper quelqu'un. Ceux-là, tout comme ceux qui refusent de se battre avec les filles, par exemple, se condamnent à rester médiocres et ne suscitent d'ailleurs que peu l'intérêt des coaches, qui savent de quelle étoffe sont faits les véritables sportifs.

Fin de la leçon pour aujourd'hui, merci d'avoir lu jusqu'au bout ces quelques réflexions.

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