mercredi 15 février 2012

Guéant! J'écris ton nom! (sur mon PQ avant de l'utiliser...)

De loin, je suis les affres de la politique française. Et autant vous dire que ça me gave. De polémiques en petites phrases, les marécages du racisme, de la haine de l'autre et de la connerie embourbent de plus en plus un pays qui aurait bien besoin d'un grand nettoyage. Au Kärcher, tiens, pourquoi pas, n'en déplaise à Monsieur N. S., que j'invite à passer de l'autre côté du tuyau, qu'on rigole un peu.
Bref, la Californie, c'est un recul forcé par rapport à l'atmosphère de la France. Et c'est peu dire qu'elle me pesait de plus en plus. J'ai retrouvé un souffle et une foi en l'humanité qui s'étaient effrités en moi au fil des constats réguliers et accablants de la dégradation des relations sociales dans ce pays. Monsieur Sarkozy, avant vous, moi, je n'avais pas peur. Je pourrais développer mais je crois que vous comprenez mon sentiment.

Ce qui m'amène là, c'est ce mail que j'ai reçu où il y a le lien vers une pétition que je vous engage à signer, en soutien à Serge Lechtimy. De lui je ne connais que le courrier (une très belle lettre d'ailleurs) qu'il a fait à Monsieur Guéant, et qui visiblement lui a valu quelque réprimande bien sentie. Je n'ai pas besoin d'en savoir plus, je m'en fiche, j'en ai marre de cette droite indigne. Je publie l'ensemble, vous souhaite une bonne lecture, une bonne réflexion, et une bonne journée.


Soutien à Serge Letchimy

Aucune excuse, aucune sanction, *
*soutien total à M. Letchimy

signez et faites circuler



Courrier de M. Letchimy: 
LETTRE OUVERTE A M. CLAUDE GUEANT,
MINISTRE DE L’INTERIEUR


M. le Ministre,

Votre venue en Martinique dans les jours qui viennent, m’oblige à vous
rappeler que cette  terre a vu naître Aimé Césaire, Frantz Fanon, Edouard
Glissant. Qu’elle a été aimée par des hommes aussi admirables que furent
Victor Schœlcher, André Breton, Léopold Sedar Senghor, Claude Lévi-Strauss,
et de manière plus proche encore, par Léopold Bissol, Georges Gratiant, ou
Camille Darsières, pour ne citer que quelques-uns de nos grands politiques.

Ces hommes furent de grands humanistes. Leur vie et leurs combats se sont
situés en face de ces crimes que furent la traite, l’esclavage, les
génocides amérindiens, les immigrations inhumaines, ou la colonisation dans
tous ses avatars… Tous ont combattu la pire des France : celle qui
justifiait les conquêtes et les exploitations, et bien d’autres exactions
dont les cicatrices sont inscrites dans nos paysages. Cependant, je n’ai
jamais entendu un seul de ces hommes lister ces attentats pour décréter que
la civilisation européenne, ou que la culture française, serait inférieure
à n’importe quelle autre. Je ne les ai jamais entendus prétendre que le
goupillon de la chrétienté (qui a sanctifié tant de dénis d’humanité)
serait plus primitif que tel bout liturgique d’une religion quelconque.

Toujours, ces hommes ont établi la distinction entre cette France de
l’ombre et la France des lumières. Pour combattre l’ombre qui menaçait leur
humanité même, ils se sont référés à la France de Montaigne, de
Montesquieu, de Pascal, de Voltaire, de Condorcet ; à celle qui s’est
battue pour abolir la traite, puis l’esclavage, qui a supprimé la peine de
mort  du code de ses sentences ou qui a accordé aux femmes le droit de vote
et celui de disposer de leur maternités… A s’en tenir à votre logique, ils
auraient eu mille raisons de condamner la civilisation occidentale, et de
renvoyer aux étages inférieurs bien des cultures européennes.

Voyez-vous M Guéant, vos chasses à l’immigré (qu’il soit en règle ou non),
ou la hiérarchisation que vous célébrez sans regrets ni remords entre les
cultures et les civilisations, vous ont enlevé la légitimité dont a
pourtant besoin votre prestigieuse fonction. Vous portez atteinte à
l’honneur de ce gouvernement, et à l’image d’une France qui visiblement
n’est pas la vôtre, mais que nous, ici, en Martinique, avons appris à
respecter.

Toutes les civilisations ont produit, et de manière équivalente, des ombres
et des lumières. Mais si les ombres n’ont jamais triomphé très longtemps,
si beaucoup d’entre elles ont disparu dans les oubliettes de l‘histoire (en
compagnie de régimes politiques ou religieux quelque peu lamentables),
c’est simplement parce que des hommes de bon sens, pétris d’humanisme et de
haute dignité, ont exalté les parts lumineuses que toutes les civilisations
de l’homo-sapiens ont mises à notre disposition.


Les civilisations se sont nourries de leurs lumières mutuelles pour mieux
combattre leurs propres ombres. Dans une transversale célébration et de
grande foi en l’Homme, ces hommes ont honoré les lumières d’où quelles
viennent ; les lumières se sont reconnues entre elles; leurs signaux
réciproques ont conservé intact (de part et d’autre des lignes de partage
ou de conflit) un grand espoir d’humanité pour tous. Grâce à eux, nous
savons qu’il est dommageable de considérer l’ombre, ou de s’en servir à des
fins qui ne grandissent personne. Ils nous ont donc appris à nous écarter
de ceux qui l’utilisent, et qui, par là même, la transportent avec eux.

M. Guéant, fouler le sol martiniquais, c’est toucher une terre que des
hommes comme Aimé Césaire ont fécondé de leur sang. Un sang qui s’est
toujours montré soucieux de l’humanisation de l’homme, du respect des
civilisations et de leurs différences.

Ce serait donc comme une injure à leur mémoire, à leur pensée, à leurs
actions, que de vous laisser une seule minute imaginer que vous serez le
bienvenu ici.


C’est par-dessus vous, et du plus haut possible, que nous renouvelons à la
France des lumières toute notre considération, et confirmons notre respect
pour les valeurs républicaines qui, contrairement à celles dont vous êtes
le héraut, sont à jamais très opportunes chez nous.

Serge Letchimy

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